La poutargue ou boutargue, appelée également 'caviar des pauvres est une spécialité culinaire populaire dans le bassin méditerranéen, notamment dans la région de Martigues en France. Elle est préparée à base d'œufs de muge (femelle du mulet) ou de thon séchés après avoir été salés.
La poutargue est prisée d'abord pour sa saveur exceptionnelle mais surtout parce qu'elle est source de vitamines (A, B, D, E), de protéines, d'iode, de phosphore, de calcium, de fer, de magnésium, de sélénium, d'acides aminés et d'oméga-3. Par ailleurs, c'est un produit cent pour cent naturel, sans additifs, ni colorants ni conservateurs.
En France, la muge est pêchée lorsqu'elle s'apprête à rejoindre la mer Méditerranée après avoir quitté l'étang de Berre. C’est à ce moment-là que les pêcheurs lui mettent la main dessus au moyen de filets horizontaux.
UN PEU D'HISTOIRE
La poutargue était une spécialité culinaire très appréciée des anciens Egyptiens il y a de cela 4.000 ans. A cette époque, elle était considérée comme un met luxueux au même titre que les œufs d'esturgeon.
Les premiers écrits faisant mention à la poutargue remontent à 1607, où les œufs de mulets salés et séchés sont décrits comme un produit donnant soif, fabriqué par les provençaux et appelé 'botarges' dans 'Le Thrésor de santé ou mesnage de la vie humaine - Fait par un des plus célèbres & fameux médecins de ce siècle' (Lyon, Huguetan, 1607). A partir du XVIIIème siècle (en 1770 dans le 'Dictionnaire portatif de commerce') on mentionne que la poutargue est fabriquée à huit lieues de Marseille, dans un endroit appelé 'Martegue'.
En 1777, le prêtre Jean-Pierre Papon décrivit le processus de séchage des œufs de mulet, identique à celui de notre époque : ' La poutargue, qu'on y fait avec les œufs des femelles des mujous ou mulets qu'on sale, quand on a bien nettoyé les ovaires, et qu'on fait sécher au soleil, après les avoir aplatis sous un poids qu'on met dessus, passe pour être fort délicate. On l'a vendue jusqu'à neuf francs la livre. On en sale tous les ans jusqu'à quarante quintaux, ce qui suppose une étonnante fécondité dans le mulet '.
Au XVIème siècle, dans Gargantua, Rabelais avait fait figurer la poutargue comme met salé consommé par Grandgousier. Il fait consommer également des centaines de poutargues à Pantagruel.
Plusieurs pays comme l'Italie, l'Égypte, et la Grèce se disputent l'origine de la boutargue. En France, on pense que cette spécialité culinaire a été importée en Provence par les Phéniciens lorsqu'ils ont fondé Marseille au VIème siècle avant Jésus-Christ. En analysant le mot poutargue et son utilisation dans le bassin méditerranéen, on se rend compte que cette spécialité est largement consommée dans la région où elle se fait appeler par des mots à consonance proche désignant exactement le même produit. Ainsi, la poutargue se fait appeler : bottarga en Italie, avgotaraho en Grèce et battarikh en Tunisie. Il semblerait que ce soient les marins phéniciens qui l'aient introduite dans le bassin méditerranéen. Par ailleurs, au XVI siècle les juifs de Constantinople auraient introduit la poutargue en Tunisie, où elle est très prisée.
LA POUTARGUE EN FRANCE
Aujourd'hui, en France la production de la poutargue selon les processus ancestraux a énormément reculé. D'abord, la surpêche et la pollution entourant l'étang de Berre ont fortement impacté le mulet, ensuite la production de la poutargue nécessite un savoir-faire particulier que très peu de pêcheurs maîtrisent. Comme vu précédemment, elle est importée à la demande de grands producteurs des pays comme la Mauritanie, le Brésil ou le Sénégal, pour faire face à une demande qui ne cesse de croître.